C’est au mois de janvier février que se faisait ce travail-là. Dans les années 45-50, 90% des familles du village élevaient un ou deux cochons, dans toutes les maisons, il y avait (l’éstabla d’el porc). Tout simplement pour avoir de la réserve de nourriture. C’était le rituel de l’époque, que les enfants de nos jours ne connaissent pas. Il avait gelé très fort cette nuit, les sabots des hommes résonnaient sur le sol, c’était l’effervescence dans la maison ce matin-là. Dans le cabanon de la cour, un grand feu léchait la grande lessiveuse dans laquelle l’eau commençait à bouillir. Je n’avais pas ordre de sortir sous prétexte qu’il faisait trop froid, mais peut être que je n’en avais pas bien envie, vu ce qui allait se passer. Dans la grande pièce qui faisait office de cuisine, le feu de la cheminée nous réchauffait, devant laquelle la chienne (Câline) était enroulée et dormait encore, par la fenêtre en montant sur la chauffeuse qui était toujours près de la cheminée, je pouvais voir dans la cour en contrebas ce qui allait se passer. Sur le chemin j’entends le roulement du charreton du tueur sur lequel était placée la grande maie, qui me fait penser à la petite barque amarrée au port du canal, dedans toute une panoplie de couteaux, hachoirs, grattoirs, fusil à aiguiser, des chaines et cordes. En prenant soin de ne pas glisser, ils descendirent le charreton dans la cour retenu par les voisins qui arrivaient en même temps, quatre voisins étaient invités pour l’opération. Parterre de la paille avait été étalée, et la maie retourné dessus. Puis tout ce monde était invité dans la cuisine pour boire un grand verre de vin rouge, je ne comprenais pas si c’était pour la soif ou pour se donner du courage à l’opération qui allait suivre. Après avoir bien trépigné avec les sabots sur le plancher les hommes sont ressortis en passant par le cabanon pour activer le feu et se réchauffer les doigts, j’entendis le verrou de la porte de l’étable grincer, je ne pouvais pas voir de ma fenêtre J’imaginais que le plus agile des hommes était enfermé dans l’étable avec une corde pour capturer la bête par le museau, au bout de quelques minutes, après des mots lancés à tous les saints que les hommes ne se privaient pas d’envoyer. L’animal c’est mis a hurler de ses cris stridents de toutes ses forces, entendu de l’autre bout du village, qui faisait deviner tiens, c’est chez un tel ! qu’on tue le cochon. C’est alors que la chienne Câline se réveillât, comprit que quelque chose de grave se passait et est venue se frotter contre mes jambes pour que je la réconforte, mais surtout elle savait que de ce jour-là, elle ne pourrait plus allez clapoter sa langue dans l’auge avec son ami le cochon aux heures des repas. Jusqu’à la prochaine Foire où deux porcelets viendraient le remplacer. Bien sanglé sur la maie et tenu par les pattes la bête se débattait de toutes ses forces les cris stridents redoublaient si bien que je me mis les mains sur les oreilles pour les atténuer, puis les cris devenaient de plus en plus rauques pour finir imperceptibles, la bête ne bougeait plus, fut roulée sur le sol pour être retourné dans la maie l’eau bouillante lui fus versée dessus,

Les hommes tiraient sur les chaines pour le faire tourner pour qu’elle trempe bien dans l’eau et là les grattoirs allaient entrer en action a fin de bien le raser de ses poils. Ma mère touillait toujours à main nue dans la bassine, qui avait recueilli le sang pour pas qu’il ne fige trop vite en refroidissant, car il allait servir pour la fabrication du boudin. Une fois bien rasé et rincé la maie était portée à bras, dans le sous-sol et placées sous la grosse poutre, sur une-pièce en bois dur (le jambier) les pattes arrière de la bête étaient fixées, et a l’aide D’une grosse corde hissée jusqu à la poutre, avec un couteau bien affûté la bête était ouverte de tout son long, la tripaille récupérée dans la grande bassine qui allait donner du travail aux femmes une grande partie de la journée pour les gratter, les retourner les rincer a fin que les boyaux soit prêts pour y ensacher le boudin, saucisse, saucissons, la tête fut coupée et allait être utilisée pour la fabrication du boudin et du pâté de tête. Après ce travail-là accomplit il était l’heure du petit déjeuner, une bûche dans la cheminée et tout se monde se mis à table avec pâté, saucisson, fromage, pain frais et vin nouveau, café et la goutte, les discutions allaient bon train. Ce n’est que le lendemain une fois refroidie que la bête allait être découpée en morceaux, les jambons bardés de sels et mis dans le saloir (récipient en bois) ou ils allaient séjourner quelques jours avant d’êtres mis dans un sac et pendus au plafond, chaque morceau savamment choisi découpé pour être conservés, il n’y avait pas le congélateur à cette époque-là, enfin la fabrication de la saucisse et saucisson, la machine était fixée sur la table et pendant de longues heures il fallait tourner la manivelle pour préparer la chair à saucisse qui tombait dans une grande grésale (récipient en terre) dans la quelle elle allait être malaxée à bras nus mélangés au sel et poivre, puis avec la même machine ensachée dans les boyaux d’où il allait sortir des mètres de saucisse et les saucissons qui seraient mis sur une barre de bois et pendue au plafond dans une pièce bien choisie, dans l’attente du séchage pour être dégusté. Une fois sec à point, pour être conservés plus longtemps, une partie des saucissons seront enfermés dans une caisse en bois remplie de cendre, pour être dégustés jusqu’à la saison prochaine. Le jour du cochon était festif, oncles, tantes, cousins, venaient aider et mangeaient à la maison.
Nous ne connaitrons plus la fête du cochon ! dans notre petit village de campagne.

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  1. Merci Hubert pour ce joli récit malgré la guerre. J’ai été aussi étonné que toi de me retrouver avec toi…

  2. Magnifique souvenirs dans ce village !!!