Les débuts du Bordeaux-Cette

Dieupentale à la chance de posséder une gare, avant qu'ils nous la démolissent comme cela est
arrivé à d'autres petites gares, nous présentons une partie de l'historique de la construction de la
ligne de chemin de fer,de Bordeaux à Cette.

Les débuts du Bordeaux-Cette

Le tableau de classement de 1842 qui déterminait la première phase du réseau de chemins de fer
devant sillonner la France prévoyait une ligne devant relier l'Océan à la Méditerranée, suivant l'axe
Bordeaux, Toulouse, Cette (1) et Marseille.
Le 14 juin 1845, le Ministre des Travaux Publics dépose un projet de loi sur la concession d'une ligne
de Bordeaux à Cette. Le tracé longe les vallées de l'Aude et de la Garonne, passant par La Réole,
Marmande, Tonneins, Agen, Moissac, Castelsarrasin, Montauban, Toulouse, Castelnaudary,
Carcassonne et Béziers ; Castres serait desservie par un embranchement. Le budget de construction
est estimé à 320 000 F par kilomètre, et le produit brut à 18 000 F, soit 5,6 %. La durée de la
concession est fixée à un maximum de 75 ans, et une subvention de 15 millions de francs est
accordée en participation à l'acquisition des terrains. Enfin, il est prévu à Bordeaux le raccordement
avec la ligne de Paris, soit par une voie empruntant le pont routier existant, soit par un ouvrage à
construire.
Cette(1) Ancienne orthographe de Sête, en vigueur jusqu'à la première guerre mondiale.

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L'Intérieur de la gare de Bordeaux-St Jean en 1900, vue en direction de Paris. Noter les rails
transversaux des chariots transbordeurs sans fosse destinés à la manutention des wagons et des
voitures. (Coït, L Chanuc)

Le 17 juin 1846 est accordée la concession, mais dans les mois qui suivent, une très mauvaise
récolte provoque en France comme en Angleterre une grave crise économique, des spéculations
succédant à la pénurie de grains, Faute de numéraire, les actionnaires — français et anglais ne
peuvent faire face à la libération des capitaux souscrits, et des compagnies comme Paris - Lyon,
Lyon -Avignon et Bordeaux -Cette sont contraintes de suspendre les travaux» La déchéance de cette
dernière est prononcée par l'arrêté ministériel du 21 décembre 1847.

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L'intérieur de la gare de Langon, vue en direction de Montauban. Les trois voies à quai sont
couvertes par une marquise métallique ; noter au fond la remise à machines et la voie couverte de
la halle aux marchandises. (Coll. L. Chanuc)

Voie ferrée et voie d'eau
De 1848 à 1852, de nombreuses propositions sont faites au Gouvernement pour la réalisation de la
ligne, avec une nouvelle préoccupation :qui sera chargé de l'exploitation du canal latéral à la
Garonne, entrepris en vertu de la loi du 2 juillet 1838 et dont les travaux s'achèvent ? Les uns
proposent la concession simultanée du chemin de fer et du canal, d'autres suggèrent carrément la
suppression du canal, et l’utilisation de sa plate-forme pour y poser des rails ! Le Gouvernement
s'oppose bien entendu à la suppression du canal, mais donne son accord à l'octroi d'une concession
unique, il stipule expressément un péage réduit sur le canal, en vue d'abaisser les tarifs sur le
chemin de fer, évitant par là les inconvénients d'une situation de monopole. Le chemin de fer
empruntera la rive gauche de la Garonne jusqu'à Langon, puis la rive droite jusqu'à Toulouse. Il
passera ensuite par Castelnaudary, Carcassonne, Narbonne, Béziers, Mèze, avant d'arriver à Cette.
D'une longueur totale de 481 km, la ligne est à terminer dans un délai de 6 ans. Le budget est
évalué à 140 millions de francs (soit 291 000 F/km), la réduction par rapport au projet Initial
résultant du recours à la voie unique dans un premier temps. Le produit net est estimé à 3,5 %.

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Le bâtiment-voyageurs de Bordeaux-St Jean au début du siècle, en correspondance directe avec
les tramways électriques urbains. (Coll. Michel Bézy)


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Arrivée d'un train de voyageurs en provenance de La Réole et se dirigeant vers Langon. (Coll. L
Chanuc)

Le canal, entrepris en 1838, a pour origine Castets, à 8,5 km à Test de Langon sur la rive
gauche de la Garonne. A Agen, il se raccorde à la Garonne, tandis qu'un aqueduc le fait passer sur la
rive droite. A Moissac est établie une jonction avec le Tarn ; le canal longe ensuite la voie ferrée,
enjambant le Tarn par un aqueduc parallèle au viaduc ferroviaire. Après les écluses de Montech (2)
se détache la branche de Montauban. Le canal se poursuit au delà jusqu'à Toulouse, suivant un
itinéraire commun avec le chemin de fer. La longueur totale du canal latéral à la Garonne est de 209
kilomètres. En 1852, lors des discussions au Parlement sur l'attribution de la concession de la ligne
Bordeaux - Cette, les travaux étaient pratiquement terminés.
(2) Remplacées vers 1970 par un plan d'eau incliné automoteur.

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La gare de La Réole vue en direction de Toulouse. Au fond, la Garonne effectue une vaste courbe,
déjà doublée par le Canal latéral ; au premier plan, des plaques tournantes donnent accès aux voies
de débord. (Coll. L Chanuc)

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Une concession élargie
Devant assurer le seul service des marchandises «petite vitesse», le revenu prévisionnel du canal
est considéré d'avance comme très faible, faisant passer le produit net de 3,5 % (exploitation du
seul chemin de fer) à 4 % (exploitation conjointe du canal et du chemin de fer). En conséquence, le
Gouvernement propose plusieurs mesures destinées à attirer les actionnaires :

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Train de marchandises quittant la gare de Port Ste Marie en direction d'Agen. Noter au centre le
poste d'aiguillage contrôlant la sortie est de la gare. (Coll. L Chanuc)

— livraison gratuite du canal à la compagnie concessionnaire ;
— accord d'une subvention de 40 millions de francs pour le chemin de fer, laissant un montant de
    100 millions à la charge de la compagnie, dont 40 % à réaliser par emprunts ;
— garantie d'intérêt de 4 % accordée durant 50 ans ;
— durée du bail fixée à 99 ans. Après des discussions sur l'opportunité d'accorder à une môme
    compagnie l'exploitation d'un canal et d'un chemin de fer, face aux risques d'une situation de
    monopole, et faute d'avoir trouvé un concessionnaire acceptant un canal concurrent, la loi est  votée
à la quasi-unanimité, et sanctionnée le 8 juillet 1852 par le Chef de l'Etat.

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Agen : passage d'un train sous le Canal latéral à la Garonne, tracté par une 221 série 1921 à 1934. A
gauche, le pont-canal franchissant la Garonne. (Coll. J. Bazot)

En 1852, la confiance est alors revenue dans les milieux financiers, et l'Etat peut môme se montrer
plus exigeant face aux candidats. C'est ainsi que la subvention accordée est réduite de 40 à 35
millions de francs, et qu'est imposée la construction de deux lignes complémentaires, Bordeaux
Bayonne et Narbonne - Perpignan. La première réutilise sur 40 km, après modernisation, la ligne de
Bordeaux à La Teste, ouverte plus de onze ans plus tôt, le 7 mai 1841. Elle est appelée à desservir
en Espagne Madrid et Cadix, mais ne traverse en France que des zones peu habitées sur 200 km. La
ligne de Perpignan constitue quant à elle une première approche vers Barcelone et toute la
Catalogne.

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Train de voyageurs quittant la gare d'Agen en direction de Montauban. A gauche, les installations
Petite Vitesse, avec la grue de chargement. (Coll. L Chanuc)

Les dépenses complémentaires à engager sont estimées à 34,5 millions de francs, avec un taux de
rentabilité de 2,33 % jugé très insuffisant. A ce titre est accordée une subvention de 16,5 millions de
francs, ainsi qu'une garantie d'intérêt de 4 % durant 50 ans. Le produit net total de l'ensemble est
estimé à 4,5 %. La convention stipule la solidarité complète des lignes concédées, un système de
péréquation devant équilibrer les résultats déficitaires et excédentaires. Le cahier des charges
autorise des rails de 27 kg/m sur traverses, et de 20 kg/m en cas de pose sur longrines.

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Lamagistère : train en provenance d'Agen, et se dirigeant vers Valence d'Agen. (Coll. L Chanuc)

La convention est ratifiée par décret du 24 août 1852, entre le Ministre des Travaux Publics et
MM.André, Bischoffsheim, d'Eichtal, duc de Galliera, Pereire, de Rothschild, Séguin. Les conditions du
paiement des subventions de 35 MF pour Bordeaux - Cette et de 16,5 MF pour les branches de
Bayonne et de Perpignan sont réglées par un décret du 13 février 1855. Malgré les inévitables
lenteurs administratives et les retards de certains fournisseurs, la construction de la ligne Bordeaux–
Cette fut remarquablement rapide.

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Valence d'Agen : arrivée d'un train de voyageurs se dirigeant vers Agen. La voie centrale est
utilisée pour le garage des trains de marchandises. (Coll. L Chanuc)

Les dates d'ouverture au trafic des divers tronçons se succédèrent de la manière suivante :
Bordeaux – Langon GV le 31 mal 1855 ; PV le 8 octobre 1855
Langon – Tonneins G V le 4 décembre 1855 ; PV le 20 décembre 1855
Tonneins - Valence d'Agen 29 mai 1856
Valence d'Agen – Toulouse 30 août 1856
Béziers-Cette 19 janvier 1857
Toulouse-Béziers 22 avril 1857

La voie et les bâtiments
L'ouverture de la section Bordeaux -Langon avait dû être différée en raison des retards dans les
livraisons des forges françaises et la Cie du Midi avait été autorisée à importer des rails anglais avec
un droit d'entrée réduit à la différence existant entre le prix des marchés initialement conclus en
France et celui auquel les fers étrangers reviendraient. En contrepartie de cette mesure d'exception,
le Gouvernement avait demandé d'abréger les délais pour l'achèvement de la ligne. Les rails anglais
Barlow, dont réutilisation avait donné lieu à des déboires, devront être rapidement remplacés.

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La gare de Toulouse-Matabiau. Le canal passe à proximité, juste derrière la balustrade.

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Carcassonne : le canal du Midi passe devant la gare. Son faible gabarit trahit son ancienneté
(ouverture en 1681) ;malgré certains trafics spécifiques (pondéraux, vrac), Une constituera pas de
véritable obstacle au développement du Chemin de fer.

Après 1870, on commencera à poser des rails en acier Bessemer ou Martin fournis par les usines
d’Imphy, du Creusot, de Terrenoire, de Firminy et de Commentry.
Ces nouveaux rails s'usaient lentement et parallèlement, alors qu'il n'en était pas de même pour les
rails en fer qui se détérioraient et étaient souvent hors de service avant d'avoir perdu une partie
notable de leur poids, A l'époque, les meilleurs rails en fer ne pouvaient supporter une circulation
supérieure à 20 millions de tonnes, chiffre qui sera porté à 200 millions avec les rails en acier.

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Dieupentale:le canal et la gare, le trafic est complémentaire, on aperçoit la passerelle qui sert a la
décharge des wagons sur les barges tirées par des chevaux, qui alimentaient la papèterie de Montech.


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Dieupentale: transbordement de barriques à vin.

La section Langon - Bordeaux à peine ouverte à voie unique, on s'occupe déjà de la pose d'une
seconde voie, car on s'attend à un trafic important qui obligera à multiplier les convois. Dès l'origine,
l'infrastructure a été réalisée pour deux voies sur toute la longueur du parcours mais, en 1857, lors
de l'ouverture de la totalité de la ligne, une seule voie aura été posée sauf sur les sections
Bordeaux - St Macaire, Dieupentale - Grisolles, Lacourtensourt -Toulouse, Narbonne - Coursan et
Agde - Cette, auxquelles s'ajoutaient les traversées de 57 gares ou stations soit, au total, 136 km de
double voie pour un parcours de 481 km.

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Dieupentale:expédition des pailles et fourrages.

En raison de l'augmentation du trafic et afin de mieux assurer la circulation des trains, la pose de la
double voie sur l'ensemble du parcours sera achevée dès décembre 1862. La compagnie notera,
alors, que la double voie amène des Réductions de personnel, de moindres frais de traction résultant
d'une marche plus régulière des trains, des suppressions d'aiguilles, toutes choses se traduisant en
économies. Le développement de l'activité de la ligne allait également rendre rapidement nécessaire
l'agrandissement des emprises et des divers bâtiments des gares. Mais, prudents, les responsables
du réseau avaient, dès l'origine, acquis les terrains qui seraient nécessaires dans un avenir prochain
et qu'on n'aurait pu se procurer plus tard que dans des conditions beaucoup plus onéreuses en
raison de la plus-value que les premiers établissements leur auraient donnée.

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Dieupentale: Train vapeur arrivant en direction de Montauban, en premier plan on aperçoit les
plaques tournantes reliées par des rails transversaux, qui étaient utilisés pour tourner les wagons.

Les dépenses d'appropriation des terrains nécessaires au Bordeaux - Cette avaient dépassé très
sensiblement les prévisions initiales par suite de l'exagération vraiment inattendue qui s'était
manifestée dans les décisions du jury d'expropriation ; dans aucune autre contrée, les prévisions les
plus raisonnables avaient été dépassées dans une proportion aussi forte et aussi peu justifiable.
Alors que tous les traités amiables que nous avions réussi à conclure se faisaient sur des bases très
peu différentes de nos évaluations, les décisions du jury, dont l'exagération semblait grandir avec les
prétentions des propriétaires, allouaient deux, trois et même quatre fois plus. Faits déplorables au
point de vue de l'équité comme à celui de l'intérêt du pays. (Rapport aux assemblées générales de la
Cie du Midi de 1855 et 1856). L'augmentation du prix de revient de la ligne était également due aux
circonstances dans lesquelles la construction avait été faite ; en particulier le développement des
constructions des autres réseaux avait entraîné une très sensible augmentation sur les matières
servant à rétablissement de la voie et sur le matériel, toutes choses entrant pour à peu près 50 %
dans la dépense totale.
Lucien Chanuc

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Dieupentale: départ des voyageurs en calèches vers Verdun sur Garonne.

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